Bernard Clavel (1923-2010), l’enraciné déraciné
Mis à jour le 20 septembre 2023
La voix de ceux qui n’en n’ont pas
Bernard Clavel nait le 29 mai 1923 à Lons-le-Saunier, dans une famille modeste de boulangers et dans une maison sans livre, sans eau courante ni électricité. Son père est âgé, sa mère le couve. Au fond du jardin, il y a un tilleul, où, pour échapper à ce monde clos, il se réfugie dans le rêveur. Le jardin lui paraît immense, il bâtit des cités, des espaces infinis.
Il fréquente l’école de Lons-le-Saunier et passe souvent ses vacances à Dole chez son oncle Charles Mour, qui deviendra L’oncle au képi blanc et le héros du Soleil des Morts. Juste avant-guerre, il assiste, fasciné, à une conférence de Paul-Emile Victor, autre illustre Jurassien, qui rentre du Groenland.
Sa famille est très marquée par la Première Guerre mondiale. Son père et l’un de ses oncles s’y sont engagés. Il a 16 ans lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate.
Le jeune Bernard Clavel s’engage à son tour dans l’armée d’Armistice, constituée à la suite de la Débâcle. Clavel quitte alors une première fois son Jura natal pour Castres. Il reviendra à Gevingey pour travailler dans les vignes, où il connaîtra Hyacinthe Perez, le « Pablo Sanchez » de L’Espagnol. Il gagne rapidement la clandestinité du maquis du Jura. À la Libération, il s’installe à Vernaison, vers Lyon, où il exerce divers petits métiers et se tourne vers les mots.
Du fournil à l’usine de lunettes, du vignoble à la forêt, de la baraque de lutte à l’atelier de reliure, de la sécurité sociale à la presse écrite et parlée, il connaîtra bien des métiers qui constituent « ses universités ». Il publie ses premiers écrits en 1956. Il se décide à s’installer en région parisienne pour mener à bien sa carrière d’écrivain.
Bernard Clavel est l’auteur d’une centaine de livres, traduits dans une vingtaine de pays, dont plus de 40 romans, des essais, des recueils de nouvelles et des livres jeunesse. Certaines de ses œuvres sont adaptées à la télévision et au cinéma, comme Le Tonnerre de Dieu en 1965, avec Jean Gabin.
Une écriture autobiographique teintée de ses combats personnels
L’œuvre de Bernard Clavel est en grande partie autobiographique. Ses trois grandes séries, La Grande Patience, Les Colonnes du ciel et Le Royaume du Nord racontent tour à tour son enfance, une page d’histoire de la Franche-Comté et sa rencontre avec le Canada, au Québec, où sa deuxième épouse, Josette Pratte, entre dans sa vie.
Épris de justice et de paix, Bernard Clavel publie successivement au début des années 70, trois ouvrages qui vont traduire son engagement dans sa lutte contre la violence, la haine et la guerre , lutte qu’il continuera à mener tout au long de sa vie.
Dans Le Silence des armes il dénonce la guerre d’Algérie et à l’époque, le Caporal Mac Seale, qui estime que le pacifisme est synonyme de lâcheté lui répond vertement. Clavel répond à son détracteur dans un essai : Lettre à un képi blanc.
Ses engagements pacifistes le rapprochent de Georges Brassens dont il devient un grand ami. Les deux hommes se retrouveront d’ailleurs sur le plateau de l’émission Apostrophe en 1975, face au Général Bigeard, pour une séquence devenue culte
Une année d’hommages
Il faudrait que les hommes, en plus de leur intelligence, aient la bonté. Et pour l'avoir il suffirait qu'ils laissent en eux une plus grande place au rêve