Le Jura selon Guillaume François, naturaliste photographe
Mis à jour le 20 octobre 2021
Si Guillaume François avait grandi dans un quartier urbain d’une grande cité, aurait-il été le même ? Le milieu où nous poussons contribue à faire de nous ce que nous sommes. Et pour ce passionné de nature, le Jura fut, dès le plus jeune âge, un terreau fertile. Très tôt, vers 6-7 ans, le jeune découvreur traverse les quelques mètres séparant la maison familiale de la forêt voisine, pour faire corps avec cet univers profond et sauvage. Adossé à un arbre, il passe des heures à écouter les sons, à dénicher les traces et indices laissés par les animaux dans la terre jurassienne. Du bout de ses jumelles, il observe ce peuple des bois, vivre secrètement loin des hommes.
Les paysages émeraudes et ambrés, les camaïeux de vert, de bleu et de blanc
Ces aventures enfantines peuplent son imaginaire et fondent sa première culture de la nature. A 13 ans, après de nombreux bivouacs et nuits au cœur de la forêt, ce Tom Sawyer jurassien reçoit son premier appareil photo, cadeau parental. L’objet deviendra un outil essentiel à sa vie et à ses escapades. « Les lumières éphémères extraordinaires, les couleurs émeraudes et ambrées, les camaïeux de bleu, de vert jusqu’au blanc immaculé en hiver… Capter toute la richesse et l’âme du Jura me fascine », confie celui qui devint, à 17 ans, photographe professionnel.
Cadeau de la nature à Baume-les-Messieurs
Au cours de ses longues journées d’affûts, par tous temps et en toutes saisons, Guillaume François fut à plusieurs reprises le témoin de spectacles uniques et inattendus. Des cadeaux sacrés de la nature, offerts par l’écrin sauvage du Jura… Ainsi évoque-t-il la rencontre incroyable avec un renardeau, aux prémices du printemps, période des naissances : « J’étais au sommet de Baume-les-Messieurs. A cette époque, je me baladais souvent en lisière de forêt pour recenser les terriers. Le renard roux est une espèce qui me subjugue ; son rôle est fondamental dans l’équilibre des écosystèmes. »
A l’affût… Patience, le renardeau est malin !
Le photographe repère un terrier avec cinq renardeaux, âgés d’à peine quelques semaines. Il s’installe, vent de face, afin de rester inodore pour les petits. Avant cela, il a soigneusement observé les allées et venues de la mère, partie chasser le campagnol, sûr désormais de ne pas la déranger. « J’avais vu une tâche de sublimes cardamines et de pissenlits, aux exquises odeurs sucrées, réchauffées par le soleil de printemps. Je me suis installé à proximité, à quelques mètres derrière un muret de pierres sèches, patrimoine typique et reconnaissable des plateaux du massif jurassien. »
Instant magique, émotion pure
Il aura fallu quinze après-midis de persévérance à Guillaume pour enfin cueillir l’instant. « Un jour, un renardeau plus curieux que ses frères s’aventure tout près des fleurs. Les nuages passent devant le soleil et m’offre une douce lumière. La respiration coupée, je le regarde s’avancer et, je n’en reviens pas, il sent les fleurs sur son chemin. A quelques mètres à peine de moi, il s’assoit, il ignore que je suis là, camouflé dans les herbes. Il observe tout autour et croque un pissenlit. Ebahi, je déclenche avec parcimonie et reprend timidement ma respiration. L’instant est là, magique et l’émotion pure. »
Hibou Grand Duc, chouette chevêchette, lynx boréal… Le Jura, ses richesses
Avec ses histoires jurassiennes, le photographe/vidéaste captive son auditoire, et encore mieux les enfants réputés indociles ! Si vous passez par Baume-les-Messieurs cet été, arrêtez-vous à l’abbaye où Guillaume François expose en juillet août. Il vous contera l’histoire des chouettes chevêchettes, minuscules trésors qui ont choisi nos forêts depuis l’ère glaciaire pour nicher. Ou bien celle des guêpiers d’Europe, l’oiseau le plus coloré de France qui élève ses petits au bord du Doubs près de Dole. A moins qu’il n’opte pour celle du hibou Grand Duc, l’équivalent en taille de 65 chouettes chevêchettes, faisant du Jura le repère du plus grand rapace du monde et de la plus petite chouette d’Europe. Et bien sûr, il vous parlera du lynx.
Le Jura vous fait du bien
Après, vous verrez, vous vous sentirez bien, les poumons libres, le cœur vaillant. « C’est l’effet de la nature, en particulier du Jura, dit-il. On n’imagine pas à quel point la vision de cette nature est source de bien-être et libère nos peurs. »
Ses conférences, Guillaume François les finit toutes par le même conseil : « Posez-vous au pied des arbres pour écouter et ressentir le vivant. »
Guillaume François